Salariés protégés : précisions sur les effets de la prise dâacte
Cour de cassation, Sociale, 10 juillet 2019, n°17-22.319
Pour rappel, la prise dâacte constitue un des modes de rupture du contrat de travail.
Plus précisément, la prise dâacte permet à un salarié de mettre terme immédiatement et définitivement à son contrat de travail après avoir formulé, par courrier recommandé, des manquements suffisamment graves à lâencontre de son employeur.
Concomitamment à cette prise dâacte, le salarié saisit le Conseil de Prudâhommes afin quâil soit statué sur les conséquences de cette rupture.
En fonction de la réalité et de la gravité des griefs évoqués par le salarié au soutien de sa prise dâacte, cette dernière peut être requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements étant suffisamment graves pour justifier la rupture aux torts exclusifs de lâemployeur, ou en une démission.
Compte tenu du caractère original de ce mode de rupture, il convenait de sâinterroger sur son articulation avec le régime dérogatoire applicable aux salariés protégés (délégués du personnel, membres du CE, CSE, du chsct, délégués syndicauxâ¦) dont le licenciement nécessite au préalable une autorisation administrative de lâInspection du travail.
Si le mécanisme de la prise dâacte est reconnu aux salariés protégés depuis 2003, des interrogations pouvaient exister lorsque la prise dâacte intervenait alors quâune procédure de licenciement était engagée à lâencontre du salarié et ce alors que la décision de lâAdministration autorisant lâemployeur à licencier nâétait pas encore intervenue.
Telle est précisément la portée de cet arrêt de la Cour de cassation en date du 10 juillet 2019.
En lâespèce, et alors que lâemployeur avait engagé une procédure de licenciement pour faute grave, le salarié prenait acte de la rupture de son contrat.
Plus précisément, la prise dâacte du salarié intervenait, le 7 juin 2012, soit postérieurement à la saisine par recours hiérarchique du Ministre du travail en vue dâannuler la décision de lâInspection du travail ayant refusé le licenciement.
Le 1er octobre 2012, le Ministre du travail annulait la décision de lâInspection du travail et autorisait lâemployeur à licencier son salarié.
Cette autorisation administrative de licenciement primait-elle sur la prise dâacte du salarié ?
Telle nâest pas la position de la Cour de cassation.
En effet, la Haute juridiction a pu préciser « que lorsqu'un salarié titulaire d'un mandat de représentant du personnel prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur quand les faits invoqués le justifiaient, quand bien même le ministre chargé du travail, saisi d'un recours hiérarchique antérieurement à la prise d'acte du salarié, a annulé postérieurement à cette prise d'acte le refus d'autorisation de licenciement prononcé initialement par l'inspecteur du travail ; »
Câest ainsi que la prise dâacte justifiée dâun salarié doit primer sur lâautorisation administrative de licenciement obtenue postérieurement.
La prise dâacte produit ainsi les effets dâun licenciement nul pour violation du statut protecteur.
Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme sa jurisprudence en la matière en affirmant quâune prise dâacte validée par le juge, compte tenu de la nature des griefs invoqués par le salarié, rompt automatiquement le contrat de travail et rend sans objet lâautorisation de licenciement lui succédant.
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(Cour de cassation, Sociale, 10 juillet 2019, n°17-22.319)